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Echange avec Maël Egron, secrétaire de la Fédération des jeunes du Parti Breton



Maël Egron, secrétaire de la Fédération des jeunes du Parti Breton, s'est prêté au jeu et nous a fait par de son point de vue sur la Bretagne et ce qu'elle représente pour lui et pour la ville de Rennes, tant en matière d'état d'esprit que dans sa communication.





"Pouvez-vous vous présenter ?"


Alors, je suis Maël Egron je suis actuellement technicien de maintenance industrielle donc en charge des réparations et entretien de toutes les machines en usine. J’ai été jusqu’en Master 1 en relations internationales et médiation interculturelle dans le domaine historique, et aujourd’hui je suis

également secrétaire de la Fédération des jeunes du Parti Breton et j’étais candidat aux législatives dans la 2ème circonscription Rennaise. Je suis dans la politique depuis pas mal d’années maintenant, j’avais rejoint l’appel de Jean-Luc Mélenchon en 2016 : la France insoumise, j’y étais de 2016 à 2020, jusqu’aux élections européennes. Cependant les positions radicales au niveau de la langue bretonne notamment et surtout les questions européennes m’ont fait partir de la France Insoumise et naturellement j’ai rejoint le parti breton par la suite. J’ai été candidat aux élections régionales l’année dernière sur la liste Ile et vilaine et je suis candidat aujourd’hui aux législatives aussi.


"Etes-vous breton d’origine ?"


Je suis né à Quimperlé dans le Finistère, la famille de ma mère est de Baye à côté de Quimperlé et la famille de mon père est de Séné à côté de Vannes.


"Si vous deviez définir la Bretagne en quelques mots ?"


Pour moi la Bretagne c’est une terre d’ouverture, on aime bien rencontrer les gens, discuter avec les

gens, on n’est pas xénophobes, on ne se laisse pas tomber dans les clichés des autres. C’est une terre qui attire les gens, qui nous fait sentir fier, on est très fier d’être bretons et il n’y a pas de gêne. Pendant des années et des siècles la Bretagne a été mal vue, même pour les bretons c’était difficile d’être bretons parce qu’on était considérés comme des ploucs. Aujourd’hui on voit qu’il y a une inversion des mœurs et les bretons sont super fiers et s’entendent bien avec les corses et certaines régions comme l’Alsace, on peut se sentir vraiment fier de notre région. On sait que même au pays Nantais il y a beaucoup de bretons et qui ne se sentent pas ligériens.


"Vous parliez justement des préjugés qu’on a sur la Bretagne, vous en pensez quoi de tout ça ?"


« En Bretagne il pleut, en bretagne on est tous ivre, on mange que des crêpes... »


Il y a une part de vrai ça c’est sûr, les préjugés nous collent à la peau et on le voit, même quand on parle à d’autres personnes originaires d’île de France, il y aura une condescendance de la part de ces gens là par rapport à nous, et pas que pour les bretons, mais il y a une condescendance. Oui c’est vrai. Dire qu’il pleut tout le temps alors qu’on est en situation de sécheresse actuellement et qu’on atteint 40 degrés vendredi c’est un peu pauvre. Après les questions d’alcool oui c’est dans les mœurs parce que par exemple ma famille qui était fermière, l’eau était pas forcément très propre à l’époque donc les gens buvaient du cidre qui est une boisson qui n’est pas forte en alcool, les gens n’allaient pas en excès. D’ailleurs les clichés du breton alcoolique vient de Français qui sont venus en Bretagne et qui ont découvert l’ambiance kermesse et quand c’est la fête on n’est pas les derniers à rigoler donc voir un breton rouler sous une table c’est pas rare quoi. C’est vrai que c’est stigmatisant forcément, il y a, peut-être pas du racisme mais il y a une forme de condescendance par rapport aux bretons et ça on le vit un peu mal quand même, mais ça commence à changer.


"Pourquoi avez-vous choisi le nom Parti Breton et pourquoi y intégrer la Bretagne ?"


Le nom a été choisi j’avais 6-7 ans et c’est pas que parti breton, on est le Parti Breton Strollad Breizh donc on est aussi le nom en breton et ça sera peut-être amené aussi à avoir le nom Gallo, parce qu’on accorde une place importante à la langue gallo qui est une langue commune entre le pays rennais et le pays nantais, on a des liens très anciens avec le pays nantais. Aujourd’hui on est obligé de se dire Parti Breton, parce que face à nous au niveau régional on a l’union démocratique bretonne et aussi d’autres partis.

Une personne qui vit en Bretagne et qui se sent breton, même s’il n’a pas forcément de racines

propres il a le droit de se dire breton, on est pas une identité clivante et fermée. Même si on peut être considéré comme quelque chose d’extrême droite et excluant : je ne suis pas breton donc j’ai pas le droit d’être du parti breton : c’est faux. Il y a des gens qui sont là car ils sont amoureux de la

Bretagne. On n’a pas de honte à être parti breton.


"Est-ce plutôt un levier ou un frein dans votre communication le fait de s’appeler Parti Breton ?"


Au niveau régional, ça ne peut pas être considéré comme un frein. Au niveau national oui, après on estime qu’il y a 5 millions de bretons dans la région de Loire atlantique et à peu près 10 millions dans la France donc il y a des gens qui sont quand même fiers d’être bretons. Au Havre, la plus grande minorité, c’est la minorité bretonne en Ile de France il y a presque 1 million de personnes qui descendent d’origines bretonnes. Cette année on a eu 2 candidatures dans les Français de l’étranger.

Maintenant quand on va à l’international on est plus apprécié en tant que breton qu’en tant que

français. Les Français aujourd’hui ont une mauvaise réputation à l’étranger et je l’ai vu, on respecte

pas forcément les règles... en Afrique il y a mêmes des manifestations anti français. Se dire breton

c’est différent, on n’est pas perçus pareil que de se dire français


"Accordez-vous une place particulière à la culture bretonne au sein du parti breton dans la

communication, surfez-vous sur cette culture ?"


Alors les cultures de Bretagne, car elles sont différentes en fonction des différents pays. La culture en

Haute Bretagne est différente avec la culture en Basse Bretagne. Le breton du Finistère n’est pas le

même breton quand dans le Morbihan. Pour nous c’est pas surfer, c’est ancré dans notre idéologie,

c’est sûr que par manque de moyens on n’a pas pu faire de communication trilingue en Haute Bretagne et bilingue en Basse bBretagne, comme on aurait voulu le faire, mais on a fait ce qu’on a pu. Avec des financements plus importants qu’on aura pour les prochaines élections, c’est sûr qu’on sera amené à faire une communication trilingue et bilingue. On n’utilise pas la Bretagne comme un logo, la Bretagne pour nous c’est notre drapeau. C’est pour ça aussi que dans notre communication on ne s’est pas emparé des symboles de la Bretagne, que ce soit l’hermine... parce qu’on ne veut pas les privatiser ces symboles. On ne veut pas que l’hermine soit : le parti breton. Et que des jeunes et moins jeunes rejettent ce symbole car il sera amalgamé avec ce parti politique. Donc on laisse la Bretagne le droit à ces symboles, nous on a nos symboles.


"Concernant les collectivités et les entreprises, je pense notamment à Rennes qui a tourné son logo

sur une identité bretonne, pensez-vous qu’eux ont intérêt à surfer sur ce concept ?"


Au niveau des entreprises oui, aujourd’hui on a une grande association des entreprises en Bretagne

qui s’appelle « Produit en Bretagne » qui comporte des dizaine de milliers d’employés donc pour les

entreprises oui c’est important. Nous on avait un candidat dans le vignoble nantais : Maxime Chéneau qui se bat contre les préjugés. Aujourd’hui on voit dans la presse « la Bretagne va avoir ses premières vignes » ce qui est faux puisque le muscadet et le vignoble nantais existent depuis des siècles, c’est un combat aussi contre les médis. On a tendance a rejeter l’identité des Nantais dans l’identité bretonne depuis 1954. Aujourd’hui pour un Nantais mieux vaut reconnu au niveau de son entreprise, en Bretagne que d’être reconnu Pays de la Loire, qui ne veut rien dire au niveau international.

La Bretagne c’est une nation, un pays reconnu à l’international, USA, canada, Japon beaucoup aussi. Alors que pays de la Loire c’est administratif et ça ne veut rien dire.


"Nantes a fait partie de la Bretagne"


Oui, et pour moi elle en fait toujours partie, et pas que Nantes, il y a Guérande, Château Briand, Batz sur mer, le Pays de rets, le vignoble nantais, pour moi c’est la Bretagne. C’est pas parce que en 1954 on a décidé administrativement de séparer le Pays nantais de la Bretagne que ça n’est plus Bretagne. Les Nantais ne se sentent pas forcément bretons car il y a les préjugés des ploucs et tout ça, même à l’école, la carte administrative de la Bretagne pour eux c’est la Bretagne. Mais il y a une inversion des mœurs, par exemple à Nantes, la municipale a fait en sorte de mettre notre drapeau sur la mairie de Nantes. A Nantes on voit Naoned en rentrant dans certaines zones on voit « bienvenue en Bretagne historique », c’est normal, c’est les bretons qui ont un peu construit Nantes


"Pour vous ce serait quoi les plus gros clichés sur la Bretagne ?"


En numéro 1 je dirais l’alcool, numéro 2 je dirais la pluie...


"Mais vous aviez dit que ça s’avérait un petit peu vrai !"


C’est vrai oui et non...Il faut aussi qu’on dise que l’alcoolisme détruit beaucoup de nos familles aussi. C’est ce qui est vrai, il y a beaucoup de nos familles qui ont été détruites par l’alcoolisme, et il y a des Bretons aujourd’hui quand on leur dit « Ouais les Bretons vous êtes alcooliques » ils sont à deux doigts de mettre un poing à la personne qui est en face, parce que oui ça a été très dur pour des familles. Il y a eu beaucoup d’alcoolisme en Bretagne, et on sait comment l’alcool rend les gens. Ce ne rend pas les gens tous guillerets et heureux. Je pense qu’il faut faire une campagne au niveau de l’alcool beaucoup plus importante que ce n’est le cas. Parce qu’aujourd’hui, moi je le vois, surtout en quartier, parce que moi j’ai grandi en quartier, on voit des jeunes de 12,13ans qui ont un « flash » comme ils le disent, c’est une flasque de vodka avec du Redbull. Et à 12,13ans on commence à voir des jeunes qui commencent à se perdre et à boire. On ne le voit pas qu’à Rennes, ça doit être valable partout. Aujourd’hui il y a une culture de l’alcool entre guillemets et ce n’est pas forcément mal vu de boire de l’alcool. Aujourd’hui il faut faire une campagne de sensibilisation hyper importante au niveau de l’alcool parce que l’alcool tue, sur les routes, ça tue des familles...et il faut le dire. Même si ce n’est pas le pire des clichés, ça fait toujours un peu marrer « Ah il tient bien l’alcool, Ah ils n’ont pas de montagnes mais ils ont une bonne descente... », mais il y a des familles qui ne rigolent pas du tout avec ça.

Après les questions de pluie, oui il pleut tout le temps, mais c’est un décalage climatique, depuis 2003 on vit des périodes de plus en plus caniculaires. Parfois on a aussi le cliché de considérer nos ruraux comme des ploucs, des paysans. Après ce sont des gens qui sont très fiers de leur terre, très fiers de leur héritage. Ils transmettent leur terre à leur famille.

Ce sont des gens attachés à leur terre, ancrés dans leur pays. Je pense que les clichés sont petit à petit en train de disparaître mais ce sont des clichés qu’on n’entend pas en Bretagne. Ce sont des clichés qui viennent de la France vers la Bretagne.


"Après il y a quelque chose de positif là-dedans, ça veut dire qu’on parle de vous !"


C’est vrai. Au niveau de la France ça peut être bien parce qu’au niveau touristique en Bretagne on est 5 000 000 à l’année et arrive l’été on est 15 000 000. Il y a des régions qui sont complètement dépeuplées l’hiver, qu’on voit au Parti breton, et notamment les résidences secondaires qui revivent en été. Les commerçants sont complices de ça, car il y a des commerçants qui n’ouvrent que 3 mois dans l’année à partir de juin jusqu’à septembre, et qui ensuite après avoir bossé, partent dans les îles, la Martinique, etc...On les connaît, on les voit, et c’est vrai qu’il y a beaucoup de commerces qui ne vivent que l’été parce qu’il y a aussi les attrape-touristes. Acheter une crêpe à 10, 12€ on sait bien que c’est un attrape-nigaud et qu’il n’y a que les Parisiens qui sont capables d’acheter une crêpe à ce prix-là. On en joue aussi ! Les bols bretons on en vend toute l’année mais surtout en été.


"On en a tous chez nous aussi"


Mais oui ça fait parler de nous. Après il n’y pas que les clichés qui font parler de nous. Il y a des paysages grandioses en Bretagne, le Morbihan n’est pas la côte de granit rose. On a une richesse de paysages incroyable. On a réussi à garder des espaces naturels. A Séné chez moi on a la réserve naturelle des Marais de Séné. Il y a la réserve de Brocéliande, au pays de Brest il y a une grande réserve naturelle, la forêt de Huelgoat notamment. La Bretagne aujourd’hui il y a un essor de l’éco-tourisme qui fait que les gens viennent en Bretagne pour faire du vélo, se promener au bord des côtes, pour faire le GR 34, pour faire le sentier des Douaniers. Il y a une Disneylandisation de la Bretagne. La Bretagne est devenue un site touristique. On le sent, on le vit, on le voit. Nous c’est ce qu’on essaye de combattre. Mieux vaut privilégier des personnes qui vivent à l’année, qui travaillent, etc...plutôt que de privilégier des personnes qui sont là deux mois dans l’année, qui ont des maisons qui font augmenter les prix. Le niveau de l’immobilier explose complètement. L’immobilier en Bretagne augmente en moyenne de 15 à 17% en fonction des régions. C’est énorme. Nous les jeunes Bretons, on se demande comment nous allons faire pour racheter nos héritages. Construire on peut déjà oublier. C’est quelque chose qui pouvait encore se faire dans les années 70 jusqu’aux années 90, aujourd’hui c’est trop cher. Les terrains constructibles sont réservés aux grosses sociétés. Un endroit où on pourrait avoir 3, 4 maisons, on construit des tours, des immeubles...Mais ça c’est pareil partout.


Quel est la relation entre la politique rennaise et la culture bretonne ? Elle est censée être capitale de Bretagne, mais que fait Rennes pour le reste de la Bretagne ?


Rien. On regarde dans le pays de Ploemeur et de Lorient, ils viennent d’investir plus de 3 000 000€ pour construire des logements. Nous à Rennes on est en train de piller Rennes métropole et on est en train de prévoir un projet de plus de 26 000 000€ juste pour enlever un parking et créer une rue dont 23 000 000€ qui sont captés par les villes de Rennes métropole...Rennes est en train de prendre un pouvoir immense sur la Bretagne. Son budget est quasiment équivalent au budget de la région Bretagne. Rennes et Nantes ensemble ont plus de budget que la région Bretagne.

Et pour la capitale de Bretagne voir tout en haut de la mairie une fleur de lys, c’est un peu bizarre. La capitale de Bretagne qui a tout au long de sa mairie une fleur de lys, c’est bizarre. Le musée des Beaux-Arts vient de racheter une statue de Louis XIV alors que Louis XIV a été connu pour la répression des bonnets rouges, avoir pratiquement exterminé jusqu’à 30% de la population rennaise...et aujourd’hui le musée est en train de racheter une statue de Louis XIV ça fait très mal de voir ça. Rennes n’est la capitale de la Bretagne que sur le papier. A Rennes on entend aucun dialecte. Il y a la langue française, il n’y a pas de gallo ni de breton. On peut voir un peu de signalitique en bilingue mais ça reste résiduel.

Rennes à mon sens, n’est une capitale que sur le papier. On le voit au stade rennais. Déjà en breton on dit Roazhon pas RouazoN. Rouazhon Park ce n’est pas du breton. C’est un anglicisme qui surfe sur l’identité bretonne mais ça ne veut rien dire en breton. C’est juste une question de façade. La ville de Rennes a pris un retard immense. Par exemple dans la ville de St Brieuc il y a une signalitique trilingue : en breton, en gallo, en français. A Rennes le gallo est absent des politiques publiques depuis des dizaines et des dizaines d’années. Il y a des groupes de pression qui se créent mais la ville de Rennes a pris un retard considérable par rapport à l’identité bretonne. Nous on essaye de faire pression pour que ça change. Au niveau culturel il y a des changements aussi. Par exemple mon collège s’appelait le collège Montbarrot, lieu-dit des propriétaires qui tenaient la ferme à l’époque et ça a été changé en « Rosa Park » ... Je ne suis pas contre mais on gomme un peu de l’identité bretonne pour une nouvelle culture mondialiste.


Rennes se tourne plus vers une identité parisienne française que bretonne ?


Oui clairement. Il faut 1H, 1H15 pour aller à Paris et plus de 2H pour aller à Brest...C’est compliqué. Il n’y a pas de ligne directe. Il faut passer par Redon, Vannes, Auray, Quimperlé...C’est pareil pour Rennes et Nantes, il n’y a pas de ligne directe. C’est symbolique. Pareil pour Bretagne Nord et Bretagne Sud. Pour aller de Saint-Brieuc à Vannes il faut faire tout le tour. Il n’y a pas de ligne directe. On est dans la toile d’araignée parisienne qui fait que tout mène vers Paris. La ligne Grande Vitesse n’a pas été faite à l’avantage des Bretons. La ligne Grande Vitesse est faite pour les travailleurs parisiens, c’est un choix de la politique de Rennes. Rennes devient la cité dortoir de Paris.

Après la communication aide aussi à pousser la culture bretonne. La Bretagne est une terre qui danse. C’est imprégné dans nos mœurs. « On n’arrête pas un peuple qui danse ». Aujourd’hui il y a une faction bretonne, qui fait que l’identité bretonne est gommée face à l’identité française. Aujourd’hui il n’y a plus d’option breton. Il y a une volonté aujourd’hui dans les familles d’avoir quelques bases de breton.

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